Tout vient à point à qui sait attendre

À la toute fin du mois de mars dernier, une manchette dans un média local annonçait un investissement de quelque 50 millions de dollars dans la construction d’une usine de conditionnement à Sorel-Tracy pour les contenants consignés. Cette annonce n’est pas l’aboutissement d’un voyage sur un long fleuve tranquille, mais plutôt l’atteinte d’une certaine maturité à laquelle nous assistons actuellement dans le monde de la récupération.

Les plus anciens se souviendront de débats volontairement polarisants sur la consigne, opposant erronément consigne et recyclage. Des débats fréquemment promptement qualifiés par certains « d’émotifs », car, on le sait, l’émotivité est rarement compatible avec la rationalité, rendant par le fait même les débats caducs, mais toujours ouverts, comme une plaie…

Je ne m’en cache pas, j’ai été un fervent « pro-consigne ». J’ai été à l’origine du regroupement Pro-Consigne Québec, formé d’une centaine d’organisations, syndicats, municipalités ou entreprises au début de la dernière décennie. La consigne était à risque, à risque de disparaître, carrément.

Aujourd’hui, l’élargissement de la consigne est mis de l’avant comme un des fers de lance de la modernisation de la récupération, en plus d’être créateur d’emplois et d’être une façon concrète d’augmenter la récupération et le recyclage de nos matières résiduelles.

Je ne vois pas ça comme un dossier où il y a eu des gagnants et des perdants, non. Pour moi, tout le monde en ressort gagnant et des annonces comme celles de la construction de l’usine de Sorel-Tracy me réjouissent.

Le développement d’un autre dossier me réjouit également, celui de la modernisation de la collecte sélective. Pour moi, cette façon de récupérer des matières recyclables n’a jamais été en opposition à la consigne, au contraire, elle lui est complémentaire.

Une collecte sélective modernisée qui veillera à uniformiser le contenu des bacs de récupération à travers la province, qui visera à imposer un minimum de contenu recyclé dans certains biens de consommation et qui ira même jusqu’à trouver des marchés après avoir consolidé les matières recyclables récupérées par l’ensemble des centres de tri. Honnêtement, je ne peux qu’appuyer les développements et les projets qui sont actuellement déployés dans cet autre dossier.

En fait, plusieurs de ces grandes lignes de la modernisation de la récupération – et d’autres – avaient été proposées dans un document que le FCQGED avait publié en 2009 dans la foulée du premier comité conjoint sur les matières recyclables mis sur pied par la ministre de l’Environnement de l’époque, Mme Line Beauchamp. Pour la petite histoire, la participation de notre organisme à ce comité n’avait même pas initialement été prévue, c’est pour dire…

Ces deux exemples montrent à quel point il faut être patient pour que les choses bougent. Oui, je sais, il y a l’urgence climatique. Il y a des actions à prendre rapidement, comme sur des questions de mobilité, et il y a des actions qui cheminent un peu comme le font les plaques tectoniques, des mouvements de fonds, comme c’est le cas lorsque l’on parle de changer nos habitudes de consommation et de récupération, notamment.

Pour ce qui est de la consigne ou de la collecte sélective, l’idée n’était pas ici de s’arroger la paternité des développements d’un dossier ou d’un autre, ce serait présomptueux, voire même ce que l’on pourrait qualifier d’appropriation environnementale (!). Non, les intervenants du milieu de la gestion des matières résiduelles ont certes leurs approches et leurs visions qui leur sont propres, mais il ne faut pas oublier que nous alimentons tous nos réflexions par des points de vue ou des opinions qui nous ont été partagés. Par la suite, une idée n’est réellement bonne que si elle est faite sienne par le plus grand nombre. Et souvent, ça prend des années pour qu’elle chemine et que finalement elle fasse consensus à défaut de faire l’unanimité.

Ce qui m’amène à faire de la projection avec une annonce qui a été faite récemment par le cabinet du ministre, mais qui est sensiblement passée sous les radars : la révision de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles. Un paragraphe enchâssé dans le communiqué de l’annonce du lancement de la Feuille de route en économique circulaire, la FREC, mentionnait que des travaux de révision de la PQGMR allaient être annoncés sous peu.

… J’ai senti le sol vibrer sous mes pieds en lisant ça…



Éditorial paru dans l’infolettre d’avril 2024

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