On jase, là…

Dans quelques jours, la consigne passera à 10 cents pour l’ensemble des contenants déjà consignés et tous les contenants de boisson en aluminium qui ne le sont pas encore. Elle passera également à 25 cents sur certains contenants de verre d’un certain volume et qui sont déjà consignés. Il n’y a toutefois pas vraiment de quoi se réjouir. Il s’agit plutôt d’une non-nouvelle.

Il y a plus de 10 ans, le ministre Arcand avait déjà annoncé une hausse de la consigne à 10 cents. Annonce qui ne s’était toutefois jamais concrétisée. Ce à quoi on assiste en fait aujourd’hui, c’est davantage une remise à jour, avec une décennie de retard.

Pour ce qui est de consigner les contenants d’aluminium qui ne le sont pas actuellement, on aurait dû faire cet exercice à chaque fois qu’un nouveau type de contenant de boisson prête à boire arrivait sur le marché. Les bouteilles d’eau par exemple, qui n’existaient pas encore vraiment en 1984, le règlement d’alors ne pouvait les prévoir, et bien, on aurait dû modifier le règlement dès qu’elles se sont mises à inonder (sans jeu de mots) le marché. On en vend aujourd’hui environ 1.2 milliard par année dans la province et elles ne sont toujours pas consignées malgré leur faible taux de récupération. Elles ne le seront pas non plus avec les changements annoncés à ce système le 1er novembre prochain. Il s’agit là d’une belle occasion ratée de vraiment progresser dans ce dossier.

Je me souviens que, dans les années 2010, à l’époque où les débats sur la consigne faisaient rage, certains disaient qu’elle était en fait une taxe déguisée, qu’elle coûtait cher ou qu’elle ne venait que dédoubler ce que la collecte sélective faisait déjà. Pourtant, on oublie souvent que la collecte sélective est tout sauf gratuite. Elle est en fait payée par l’ensemble des consommateurs par le biais d’un montant qui est inclus dans le prix d’achat des contenants, imprimés ou emballages, mais qui n’est pas indiqué sur la facture.

Ainsi, nous payons environ 10 cents par bouteille de vin en frais environnementaux qui ne nous sont jamais remboursés. Nous payons aussi une contribution pour la collecte sélective quand nous achetons une boîte de nos biscuits préférés, des soupes en conserve, ou encore une pinte de lait, etc., etc.

En 2022, c’est 237 millions de dollars que nous avons collectivement payés, 100 millions de plus qu’il y a dix ans. Et même si nous participons religieusement à la collecte sélective, cet argent ne nous est pas remboursé, comme l’est pourtant celui de la consigne.

Je me souviens qu’en 2015, la SAQ avait sorti une « étude » commandée à la firme LIDD pour établir les coûts de la consignation sur ses bouteilles. Ce montant avait été établi à 50 millions par année, sur 5 ans… Toute proportion gardée, la consigne sur les bouteilles de la SAQ pourrait s’avérer être en fait une aubaine pour les consommateurs… Et surtout pour l’environnement quand on sait ce qu’il advient de ses bouteilles quand elles sont mises dans les bacs…

Mais revenons-en à ces 237 millions de dollars de contributions que les producteurs ont versés à l’organisme de gestion désigné (OGD) pour la collecte sélective au Québec en 2022.

Il faut savoir que ce montant couvre sensiblement les coûts de collecte, de transport et de tri des matières recyclables qui sont récupérées par la collecte sélective municipale. Il faut également savoir que seulement 47% de ces matières générées à la maison ont été envoyées à des conditionneurs ou à des recycleurs selon le bilan 2021 de RECYC-QUÉBEC. C’est-à-dire que près de la moitié des matières recyclables d’origine résidentielle qui aurait dû être recyclée ne l’a pas été.

Mais, quand on sait qu’en 2025 l’OGD responsable de la modernisation de la collecte sélective deviendra propriétaire des matières recyclables qui sortiront des centres de tri, est-ce qu’elle le deviendra également pour celles qui se retrouveront à l’enfouissement ? Ça ne serait pas logique ou du moins, plus juste ? On jase, là…

Une autre réflexion concernant le citoyen qui rapporte religieusement ses contenants consignés dans un lieu de dépôt, la prise en charge de ces derniers sera alors à coûts nuls pour lui, les montants de la consigne lui étant intégralement remboursés. Devrait-il en être de même pour le citoyen qui participe avec assiduité à la collecte sélective ? C’est quand même lui qui finance le système qui n’achemine à des fins de recyclage aujourd’hui qu’environ 50 % des contenants, imprimés et emballages.

Ça veut dire aussi qu’environ 50 % des matières pour lesquelles des contributions environnementales ont été perçues, sont soit éliminées, rejetées, entreposées ou non recyclées. Les bons gestes de ce citoyen ne se reflètent même pas sur son compte de taxes municipales. N’y aurait-il pas lieu de trouver un mécanisme pour récompenser ce bon citoyen ou pour en encourager d’autres à le devenir également quand on parle de récupération ? On jase, là…

En terminant, j’aimerais revenir avec un mot sur cette fameuse étude de la SAQ qui nous disait pratiquement que la consigne sur ses bouteilles était financièrement irréalisable. Comme le gars des vues avait bien fait son travail à l’époque, elle a presque immédiatement été suivie par l’annonce d’un plan nommé « Verre l’innovation » qui consistait en fait en une série de projets-pilotes qui se sont déroulés sur plusieurs mois. Un rapport sur ces projets a été publié au début de 2019, quelques mois avant les élections provinciales. Où en sommes-nous maintenant avec les retombées de ce plan qui devait aboutir sur le recyclage de 100 % du verre récupéré par la collecte sélective ?

C’est drôle, parce qu’aujourd’hui, j’ai l’impression de revivre le même film dans le dossier de la consigne avec un nouveau plan que l’on pourrait nommer « Vers les prochaines élections » et pour lequel les scènes des futurs reports de l’élargissement de ce système de récupération sont sur le point d’être finalisées. On jase, là…

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