Qui peut se vanter d’avoir vu Greta Thurnberg en chair et en os ? Et bien, moi. Je l’ai vue le 27 septembre 2019 à Montréal. Je l’ai vue comme environ 500 000 autres personnes. Nous avions l’impression de nous réapproprier le monde, plus rien ni personne ne pouvait nous arrêter ! « Si les gens au pouvoir n’assument pas leurs responsabilités, nous allons le faire à leur place », avait-elle lancé devant la foule. Que s’est-il passé par la suite ? Le 28 septembre est arrivé comme prévu, puis le 29, le 30… J’en garde un bon souvenir de cette journée avec Greta, il faisait beau, il faisait chaud.
En fait, il ne s’agissait pas d’une manifestation, mais davantage d’une marche de solidarité ou d’une longue procession. J’ai rarement vu une aussi grosse marée humaine générant si peu de vagues ou qui n’a pas eu de ressac digne de ce nom.
Je me souviens d’autres manifestations, dont une avec les Signataires du Rebut Global devant les locaux de la CMM sur la rue Sherbrooke, ou encore celle qui a eu lieu dans les rues de Saint-Jérôme contre l’agrandissement du site de Sainte-Sophie, ou bien une autre, près de l’hôpital Pierre-Le Gardeur de Terrebonne avec des centaines de citoyens et des médecins dénonçant les impacts du LET de l’endroit. Ça brassait un peu les choses, ça dérangeait, mais on ne lâchait pas le morceau comme on dit. Ça faisait avancer les choses. Pas toujours assez loin pour certains, mais c’était du concret. C’est rendu loin tout ça aujourd’hui, de telles actions de mobilisation seraient très certainement impossibles à refaire de nos jours.
Maintenant, la plupart des manifestations de masse en environnement ne sont jamais trop compromettantes pour leurs participants; la cause plaît généralement toujours au plus grand nombre et leurs impacts sont souvent aussi éphémères que l’intérêt des gens au pouvoir. En fait, je suis un peu dur : les gens au pouvoir aiment ça, ça les fait bien paraître et ce n’est pas trop engageant.
Pourtant, jamais n’a-t-on autant parlé d’environnement et subi ses dérèglements toujours plus violents et plus fréquents. Logiquement, on devrait croire que ça raviverait une certaine pression populaire, que ça ferait réagir ? Récemment, un article d’Alexandre Shields du Devoir faisait ressortir l’apathie des Québécois face à la question environnementale et de l’essoufflement de l’engagement individuel. La plus grande contribution des citoyens contre les changements climatiques ? : le recyclage à la maison. Le mythe du XXIe siècle, comme j’ai déjà appelé ça. La récupération en vue du recyclage est importante et nécessaire, mais, à elle seule, elle n’est pas la solution, surtout si on ne change pas nos modes de production et de consommation.
Jusqu’à un certain point, je dirais que ce qu’on appelle le recyclage (la récupération des matières recyclables, dois-je le rappeler) nous apporte une certaine satiété sur le plan environnemental. Pas étonnant que les messages portant sur le recyclage soient si nombreux à l’école, au travail ou même dans la plupart des centres d’achat, car tout le monde le sait, c’est en recyclant que l’on sauve la planète. C’est aussi pas très contraignant.
Les manifestations environnementales se font aussi et surtout maintenant avec des clics ou des likes. Bien au chaud dans leur voiture en marche à pitonner sur leur cellulaire, je me console en pensant que ces bons citoyens qui recyclent à la maison, likent peut-être des posts à saveur environnementale.
Pour paraphraser un peu Richard Desjardins, c’est correct de liker, mais il faut aussi faire quelque chose en attendant. Les réseaux sociaux sont des outils de mobilisation extrêmement efficaces, mais avec lesquels on oublie trop souvent ce à quoi ils servent, c’est-à-dire à favoriser la communication entre les individus.
Ce n’est plus qui m’aime me suive qui prévaut de nos jours, mais bien qui me suit me like.
Souhaits des fêtes
À Consignaction : Du temps (mais pas trop) pour arriver à bon port avec ses lieux de dépôt et, pourquoi pas, devancer 2027 pour la consigne sur les bouteilles de la SAQ.
À la SAQ : De réaliser qu’elle est au coeur du succès de l’élargissement de la consigne sur ses contenants et qu’elle prenne son rôle de leader pour y arriver.
À Benoit Charette : Plus d’argent pour son ministère, plus de personnel et plus de place au conseil des ministres.
À mon président bien-aimé : Tout ce qu’il désire et bien plus avant la renégociation de mon contrat.
À Éco Entreprise Québec : Un gros merde pour le 1er janvier.
À Simon Paré-Poupart : Que les gens réalisent enfin votre rôle essentiel dans notre société et un deuxième livre sur les abus de notre consommation.
À nous tous : De profiter au maximum du temps des fêtes et de ne pas trop culpabiliser avec nos excès.
Aux inondés, sinistrés, réfugiés ou délocalisés à cause des changements climatiques : Qu’on prenne la pleine mesure de ce que vous vivez et qu’on fasse tout ce qui est collectivement possible pour ne plus que ça se reproduise.
À la planète : Résister et faire preuve de résilience face à la tempête annoncée le 20 janvier prochain. (Et, en passant, la planète n’a pas besoin d’être sauvée, elle nous survivra).
Éditorial paru dans l’infolettre de décembre 2024