Un éditorial avec moins de contenu, mais qui vous emballera quand même

On s’entend, le suremballage et les emballages non nécessaires sont un fléau. Il ne faut toutefois pas démoniser tous les emballages. L’emballage, surtout celui alimentaire, est devenu nécessaire pour palier le fait que nous cuisinons de moins en moins, que nous nous nourrissons de plus en plus d’aliments ultra-transformés, principalement accessibles en portions individualisées. Dans certains cas, ce qu’on appelle l’écoemballage peut aussi être un moyen de compenser notre surconsommation d’emballage. En revanche, il peut aussi être l’arbre qui tente de nous dissimuler la forêt derrière lui.

Dans notre société de consommation, celle dans laquelle presque tous nos produits achetés font des centaines, voire des milliers de kilomètres avant de se retrouver sur les tablettes de nos magasins, les emballages sont légion, pour le meilleur et pour le pire.

L’emballage a plusieurs buts : protéger les biens ou préserver les aliments, nous fournir de l’information sur le produit mis en vente. Il a aussi des fonctions qui nous sont présentées comme étant hygiéniques. Aussi, il ne faut pas se le cacher, les emballages ont aussi un rôle très important dans la mise en marché d’un produit, ils sont là pour nous faire acheter ce qu’ils contiennent.

Parfois, même, l’emballage devient le produit. On achète tel ou tel objet, telle ou telle denrée à cause de son emballage. Il peut servir de décoration après usage, il arbore des images de nos idoles, il est présenté comme étant recyclable et j’en passe. Dans certains cas, on se pose moins de questions sur le produit lui-même, sur sa nécessité ou sur ses impacts sur l’environnement que sur les impacts des emballages. L’emballage devient le message, pour paraphraser McLuhan.

Dernièrement, j’ai vu passer une capsule d’information sur une bouteille optimisée d’un yogourt prêt à boire d’une grande marque et qui vantait ses mérites. D’une contenance de 200 ml, le fabricant avait réussi à concevoir la même bouteille, mais avec une réduction de moins de 3,5% de plastique pour ce faire. La bouteille demeurait quand même un produit à usage unique avec son étiquette-manchon en PVC qui la recouvre presque entièrement et pouvant nuire à l’identification du plastique qui la compose.

Parle-t-on ici d’une réelle amélioration sur le plan environnemental ? En tout cas, si vous en consommez maintenant, gardez ces bouteilles, car elles vaudront 10 cents le 1er mars prochain, jour de l’implantation de la deuxième phase de la consigne élargie…

Ce genre de « nouvelle » est pour moi une façon d’occulter que nous sommes en présence d’un produit ultra-transformé, vendu en portion individualisée (pour enfants notamment) dans un contenant à usage unique et qui peut avoir des enjeux sur le plan de sa recyclabilité. Je ne parle pas non plus ici de son emballage secondaire qui est un des plus visibles sur les tablettes des magasins par ses couleurs vives et ses dessins attrayants.

On dit aussi que l’optimisation des emballages peut être utile pour le transport de certains produits alimentaires. Par leur forme ergonomique, on peut en mettre davantage dans une boîte et ainsi sauver de l’espace et réduire notre production de gaz à effet de serre. Oui, ça peut être vrai, pourvu que la cargaison des boîtes de ces produits soit également optimisée lors de leur transport. Si un camion qui les transporte ne contient que deux ou trois de ces boîtes lors d’une livraison, on ne peut pas vraiment dire que l’opération en soit une gagnante sur le plan de la réduction des GES…

Une autre forme d’optimisation des contenants qui peut justement ne pas optimiser les impacts environnementaux, c’est lorsque l’on mise sur la réduction du poids des emballages. Que ce soit par substitution (on change un contenant en verre pour un contenant en plastique), ou en réduisant le poids d’un contenant, d’une bouteille de verre, par exemple. La notion de réduire le poids d’un emballage, n’est pas toujours la bonne chose à faire, même si dans les bilans environnementaux, cela indique que nous avons fait des efforts sur le plan de la réduction des déchets. Nous calculons la performance de la réduction de nos déchets uniquement en poids. Cela est parfois trompeur, même insidieux, sur le plan environnemental.

Cette dernière option, celle de la réduction du poids des contenants, en est une qui a été retenue par notre Société des Alcools afin de réduire son empreinte environnementale. Des bouteilles plus légères entraînent une diminution de poids à transporter, donc une diminution des GES. Ça, encore une fois, c’est si et seulement si le transport des bouteilles est lui aussi optimisé, sinon, l’impact de la diminution du poids des bouteilles est annihilé par une logistique d’acheminement des contenants défaillante.

De surcroît, une bouteille plus légère veut également dire une bouteille plus fragile, qui n’est pas nécessairement conçue pour le réemploi, donc à remplissage unique. Sachant que nos bouteilles de vins et spiritueux récupérées dans nos bacs résidentiels ne peuvent être recyclées en contenants de verre, car trop contaminées, il appert que le réemploi pourrait être une solution nettement plus environnementale. D’autant plus qu’avec l’avènement de la consigne sur ces contenants le 1er mars prochain, ce type de collecte rend le réemploi de ces derniers davantage possible pour les quelque 80 millions de bouteilles de vin qui sont embouteillées localement. Je ne parle pas ici des vins issus de nos vignobles, mais bien de celui importé en vrac par bateau puis embouteillé ici.

Dans ce cas précis, l’optimisation de la bouteille devrait être de lui donner une forme standard et qui soit résistante aux opérations de remplissages multiples, comme les fameuses bouteilles de bière brunes, les BSI dans le jargon.

Un autre point que j’aimerais aborder ici, c’est celui de la réduflation. Le fait de nous vendre moins de produits dans un emballage quasi identique à ce qu’il était auparavant, et ce, au même prix.

Ce n’est pas tant le sentiment de m’être fait réduflouer qui me dérange ici (quoique…), mais bien de devoir consommer plus d’emballage par quantité de produits achetés. J’ai parfois du mal à concevoir que les producteurs qui font l’éloge de l’écoconception peuvent parfois être les mêmes qui mettent en pratique des techniques de réduflation.

En tout cas j’espère sincèrement que cela change en 2025 avec la modernisation de la collecte sélective.

J’en fais un de mes vœux pour la nouvelle année.


Éditorial paru dans l’infolettre d’octobre 2024

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