Il faut qu’on vide notre sac (de vidanges)

Sommes-nous inconscients ? Aimons-nous gaspiller nos ressources et notre argent ? Avec les dernières données compilées par RECYC-QUÉBEC, je me pose sérieusement la question… Avant, j’avais tendance à minimiser les aberrations dans le monde des vidanges qui font souvent la une de certains médias. Je me disais que ce n’était dû qu’à une poignée d’inciviques et non pas à la majorité. Mais, est-ce réellement le cas ?

Je veux bien qu’on fasse ressortir les bonnes nouvelles, c’est encourageant. Comme c’est d’ailleurs le cas avec le dernier bilan sur la gestion des matières résiduelles qui démontre que les matières destinées à l’élimination ont baissé de 5% entre 2021 et 2023. On ne se serait toutefois pas attendu à moins avec le déploiement de la collecte des matières organiques dans la province au cours de cette période.

Encourageant, oui, mais on ne peut crier victoire encore. Nos ordures domestiques renferment encore trop de matières recyclables ou organiques. En effet, elles en contiennent respectivement 33 % et 39 % ! Ce qui veut dire que près des trois quarts de ce que nous mettons aux poubelles ne devraient pas y être ! Aussi, en décortiquant les sections de ce bilan qui sont disponibles, on arrive à une génération de matières résiduelles qui dépasse les 12,5 millions de tonnes. Ça, c’est plus de 1,4 tonne par habitant en 2023, ce qui représente une production d’environ 24 tonnes de matières résiduelles à la minute dans notre (pou)belle province !

Et on se plaint. On dit que gérer les poubelles, ça coûte cher, que nous n’avons pas assez de collectes et que ça pue dans les ruelles de Montréal.

Moi je dis que la gestion de nos déchets ne coûte pas encore assez cher. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles nous en produisons encore trop que nous en disposons sans discernement. Jeter -n’importe comment de surcroît- est maintenant considéré comme un droit acquis. Et bien non, je vous le dis, polluer n’est pas un droit.

Ça coûte cher ? Prenez n’importe quel service d’application de livraisons de repas, deux fois par semaine, et ça va vous coûter plus cher que les montants pour la collecte des déchets sur votre compte de taxes. N’oublions pas qu’on ne fait pas que ramasser le contenu de vos bacs ou de vos sacs, on leur fait faire des dizaines – quand ce n’est pas des centaines – de kilomètres pour aller en disposer dans des endroits où ça coûte encore de l’argent. Il faudrait en plus que les collectes de déchets soient gratuites ? En Europe, l’enfouissement peut coûter bien au-delà de 500 $ la tonne. Au Japon, n’y pensez même pas.

Idem pour les odeurs, on dit que le compost pue, que l’espacement des collectes des ordures, c’est pire que pire. Pensez-y : avec une collecte de matières organiques par semaine, une autre pour les ordures en alternance avec celle pour les matières recyclables aux semaines, ça fait 4 collectes aux deux semaines. Si ça pue encore, c’est souvent qu’on utilise le mauvais bac pour disposer de nos matières organiques, ce que démontre clairement le dernier bilan sur la GMR. Une question que je me pose aussi : on faisait comment avant l’arrivée du bac brun, ça ne sentait jamais mauvais ?

L’autre jour, en lisant un dossier de Michel Hersir dans le Courrier du Sud de Longueuil, j’ai lu que la Société d’économie mixte de l’Est de la Couronne Sud, ceux qui gèrent l’usine de biométhanisation de la Rive-Sud, avait déjà reçu dans les matières organiques des pneus de vélo, des échelles de piscine et… une boule de quilles ! Non, sérieux ? Vous ne pensez pas que c’est peut-être le temps de donner un tour de vis aux récalcitrants et à ces inciviques ?

Non seulement les comportements délinquants ou je-m’en-foutistes nous coûtent cher en gestion et en qualité de vie, ils privent des entreprises d’ici de matières premières pour la fabrication de biens à partir du gisement que sont nos matières résiduelles. Nos matières résiduelles ne sont pas de simples déchets : ce sont des ressources pour lesquelles nous n’avons plus d’usages, mais qui, pour d’autres, elles pourraient en trouver. Tout le monde aime et connaît le concept de donner au suivant, et bien, faisons-donc la même chose avec nos matières résiduelles. Donnons ces ressources au suivant.

Jeter moins, mais mieux, tout en s’enrichissant collectivement, n’est-ce pas là un beau programme ?


Éditorial paru dans l’infolettre de juin 2025

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