La décroissance est insoutenable

Pour ceux et celles qui croient que la décroissance est la voie à suivre, et bien, ils se trompent. Je crois qu’il faut que nous cessions de tendre l’oreille aux sirènes, de nous laisser appâter par des discours certes séduisants, mais insidieux, voire irresponsables. Rêver d’un monde meilleur est un sentiment noble, mais quand le rêve devient une utopie, voire une lubie qui cherche à nous enrôler tous, ce n’est plus drôle. Il est temps d’agir pour mettre fin à cette dérive qui nous entraîne un peu plus chaque jour vers l’abîme.

Il faut effectivement mettre fin à la décroissance de la capacité de support de nos écosystèmes, à celle de notre biodiversité, de nos ressources, de nos terres agricoles, de la qualité de notre eau douce ou de nos milieux marins. Et oui, cette décroissance n’est pas soutenable et nous agresse de partout.

Les utopistes ne sont pas ceux qui réclament un peu de sobriété dans notre consommation, mais bien ceux qui pensent que cette consommation de ressources peut se faire indéfiniment et à outrance. Je n’ai pas dit ici de cesser de consommer, mais de consommer moins, mais mieux. Et aussi autrement.

Il y a aussi cette sacro-sainte nécessité du développement, de la création de la richesse pour pouvoir la redistribuer par la suite. En fait, notre développement n’a pas créé de réelles richesses, il s’est basé sur l’accaparement et la destruction de ces dernières.

L’idée d’aborder la décroissance de nos ressources et de notre écosystème m’est venue avant la publication ce mois-ci, d’un rapport complémentaire de Circle Economy et de RECYC-QUÉBEC sur l’Indice sur la circularité de l’économie paru en 2021.

Dans ce rapport que je vous suggère incidemment fortement de lire (et celui de 2021 par la même occasion), il y a une phrase percutante dont la teneur a été, à ma connaissance, rarement vue dans une publication officielle. Elle fait littéralement référence à la fin de l’espèce humaine sur Terre ! :

« Nous vivons désormais au-delà d’un espace de fonctionnement durable et nous nous trouvons dans la « zone de danger » d’un changement irréversible du système naturel permettant le maintien de la vie sur Terre ».

Bon, ce document n’annonce tout de même pas l’apocalypse, mais pas loin. Il nous donne cependant des pistes de solution pour nous en éloigner. Très grosso et très modo, on a trouvé 9 limites planétaires qu’il ne faut pas dépasser, car on franchirait alors des points de non-retour qui nous mènerait tout droit vers notre extinction. Au Québec, nous en avons ciblé 6 et découvert que nous en dépassions 3.

Pour faire simple, nous sommes sur le bord du Styx et ce ne serait pas une bonne idée de le traverser.

Ce qu’il y a aussi d’intéressant dans ce rapport, ce sont les moyens proposés pour nous en sortir. Bien que les limites que nous avons dépassées ici concernent les changements climatiques, l’utilisation de l’eau douce et l’eutrophisation des océans, les mesures de remédiation qui nous sont présentées relèvent en quasi-totalité de notre consommation, ou de nos modes de production.

Cette approche n’est toutefois pas surprenante quand on sait qu’environ 70 % des émissions de GES à l’échelle mondiale sont directement reliés à notre consommation des ressources et qu’au Québec, nous en consommons annuellement 32 tonnes par habitant, soit près de 3 fois la moyenne mondiale. Pas surprenant non plus que ce rapport établisse à plus de 1 000 % le dépassement d’émission de GES pour notre province pour ce qui est du calcul de cette limite planétaire.

D’où ma question : Pouvons-nous continuer de croître comme nous l’avons toujours fait ? Ou plutôt, pouvons-nous continuer d’entraîner la décroissance de nos ressources, de nos écosystèmes et de notre biodiversité pour alimenter notre développement ?

Poser la question, c’est en fait bien sûr d’y répondre et la réponse est non.

Loin de moi l’idée d’opposer ici développement et consommation, non. Mais nous savons tous que notre croissance comme nous la soutenons n’est pas viable (oui, oui, même vous !). Nous savons également que nous vivons dans un monde guidé par la consommation. Alors, pourquoi ne pas développer des formes de consommation qui seraient basées sur nos réels besoins et qui respecteraient nos limites planétaires ?

De plus en plus d’études et de rapports à l’échelle mondiale suggèrent une consommation et une production plus sobre, plus responsable. Au Québec, c’est exactement ce que fait la Semaine québécoise de réduction des déchets depuis près de 25 ans.

Ce qui est convenu d’appeler l’économie circulaire a beaucoup évolué et s’est beaucoup raffinée au cours des récentes années. Il serait peut-être temps de s’en inspirer et d’appliquer ce qu’elle propose dans les choix et les décisions qui façonneront à l’avenir notre développement.

Ce n’est maintenant plus vraiment une question de choix.


Éditorial paru dans l’infolettre de septembre 2024

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