Je recycle… moi non plus.

« Recycler » : pour des centaines de milliers de Québécoises et Québécois, il s’agit du premier geste écoresponsable concret. Toutefois, quel rôle joue-t-on réellement, en tant que consommateur, dans la chaîne de recyclage ? Peut-on vraiment dire que le Québec est un peuple de recycleurs ? On fait le point sur ce geste répandu, mais pourtant mal compris.

Voilà plus de 25 ans que je travaille dans le domaine de la gestion écologique des déchets et bien, croyez-le ou non, je ne recycle toujours pas mes boîtes de conserve, mes journaux ou encore mes pots de margarine à la maison.

Non, je ne les recycle pas, je les récupère dans mon bac de récupération.

Si anodine soit-elle, cette nuance est extrêmement importante. Le fait de penser que l’on recycle à la maison conditionne notre comportement de consommateur et par le fait même, notre consommation. « Je consomme, peut-être, mais je recycle, donc je pose le bon geste pour l’environnement. »

Certes, le fait de mettre un emballage dans le bac de récupération n’est pas une mauvaise chose en soi, mais, à lui seul, il n’assurera pas la pérennité de nos ressources. En fait, une partie de la solution se trouve en amont, dans nos choix de consommation, dans notre consommation tout court.

« Recycler » peut parfois ressembler à un sauf-conduit pour compenser notre consommation à outrance de produits suremballés ou de courte durée de vie.

Les entreprises, au sens large, vont faire la promotion du recyclage de leurs produits, elles vont même l’encourager. Mention « Recyclable » bien en évidence, programme de « recyclage » dans les magasins, boîte de « recyclage » bien en vue. Paradoxalement, le recyclage devient même un outil de promotion pour la consommation de certains produits.

En fait, quand on y pense, tout est recyclable. Reste à savoir si le geste suit la volonté. Car, si tout est recyclable, tout ne peut être recyclé dans les faits. Ça prend plusieurs facteurs réunis pour y parvenir, notamment :

– un produit fait d’une matière unique ou dont les composantes peuvent être (efficacement) séparées ;

– un mode de récupération approprié ;

– un tri et/ou un conditionnement efficace, i.e, répondant aux exigences des recycleurs ;

– un coût de revient supportable pour les entreprises de la chaîne de recyclage ;

– un réel marché existant pour la matière récupérée ;

– un prix concurrentiel à l’achat pour le consommateur ;

– etc.

À cela peuvent s’ajouter des notions d’internalisation des coûts pour les produits fabriqués à partir de matières vierges, d’écofiscalité ou encore d’impacts environnementaux induits par les activités du recyclage lui-même pour motiver – ou pas – une opération visant le recyclage d’un bien de consommation.

Le citoyen/consommateur, quant à lui, n’a souvent accès qu’au maillon de la récupération dans cette chaîne-là. Pour ce qui est des opérations en amont, comme la conception ou la production du bien en question, il n’y a souvent pas accès. Idem pour ce qui est des opérations en aval, comme le tri des matières et leur finalité. Il n’existe effectivement pas de mesures de traçabilité des matières récupérées au Québec qui permettraient d’informer le citoyen ou de le rassurer sur l’impact environnemental réel des produits qu’il met dans son bac de récupération.

Or, nous oublions trop souvent que nous ne sommes justement pas seulement l’un des maillons de la chaîne de recyclage. Nous avons la possibilité de modifier cette chaîne dans son entièreté par nos choix de consommation. Ces choix peuvent également se traduire par un refus de consommer un produit dont les impacts sur l’environnement seraient trop importants. Mais pour poser les bons gestes, ou les bons choix justement, il faut avoir accès à la bonne information, et la plus complète possible. Il faut, en tant que société, poser des questions et valider les réponses reçues.

Si récupérer en vue de recycler est un bon geste à poser, il n’est pourtant pas tout le temps le meilleur. Quelqu’un m’a déjà dit une fois qu’une personne intelligente va trouver une solution à un problème, mais qu’une personne sage tentera d’éviter le problème en question.

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